Les différents noms au fil du temps : Besara/Bessara (dans le périple d'Avienus), Betarratis (sur les monnaies Volques), Baeterrae/Baetirae (au moins -35 av JC, repris par Pline), Beterris au moins du IXème siècle --> au XVème, puis Besièrs ou Béziers (au XVIIème)
Ethymologie : Le nom s'étant modifié au fil des siècles, il est difficile d'en trouver l'origine. J'ai abandonné la première hypothèse que j'avais basé sur le nom "Biterris" - qui aurait été d'origine Celtique (voire Celtibère) et signifiant "maisons ou habitations du gué" ou d'origine proto-Basque signifiant "Bourg de la route". En effet, le nom "Biterris" n'apparait qu'après la période d'occupation Romaine.
Ne trouvant rien, pour l'instant, sur la première appellation "Besara" ou "Betarratis", j'ai échaffaudé l'hypothèse suivante sur le nom Romain "Baeterrae" : Le nom semble composé de deux noms : Bae + Terrae. Sachant que la signification Latine de "Terra/Terrae" signifie "la terre/les terres" il faut à présent envisager le sens de Bae" ou "Bæ". Après de multiples recherches, et en isolant les langages de l'Europe de l'ouest, j'ai trouvé 2 définitions :
La première pour Bæ: En Zeneize (langage de la ville de Gêne - Genova, Italie) cela signifie : "agneau".
Cette hypothèse est plausible dans la mesure où les Ligures, un peuple en provenance de cette région d'Italie, ont colonisé un temps notre région et, de plus, l'élevage du mouton y remonte à la préhistoire. Cela nous donnerait donc comme traduction : Les terres de l'agneau.
La seconde pour Bae : En Gallois, cela signifie "Baie".
Sachant que des tribus Celtiques, mais aussi les Ligures en provenance du pays de Galles et d'Ecosse, ont colonisé notre région, cela reste aussi plausible. En outre, on sait que la Méditerranée était bien plus proche de Béziers dans le passé.
Cela nous donnerait donc comme traduction : Les terres de la baie.
D'autres hypothèses nous sont fournies sur le site "SORDON" d'André Sordes.
Béziers a une histoire fort ancienne, aussi vieille, sans doute que n'importe quelle autre ville du littoral occidental de la Méditerranée. Les collines de la région de Béziers, ainsi que celles sur lesquelles la ville prend place, ont été formées à l'époque glacière. Déjà, des restes attestent de la présence humaine, sous forme de silex taillés, technique de l'Age du Chelléen, première étape du Paléolithique ou de l'Age de la Pierre.
A cette époque, les glaciers ont occupé plusieurs fois les vallées, en les creusant ou en les comblant; de même pour la mer venant frapper les collines de Béziers ou se retirant. On peut trouver des restes de coquilles sur la colline du Four à Chaux, vers la Fontneuve (en dessous le cimetière vieux), ainsi que de nombreux fossiles à coté de Cessenon, dans l'ancienne carrière de marbre. Le climat était soit celui de la Toundra d'Alaska, soit celui des plaines chaudes d'Afrique.
On y trouvait, soit le rhinocéros ou l'hippopotame, soit le mammouth ou le bison, soit le renne ou le mouflon. La plus ancienne trace humaine sont des bifaces lancéolés datant de la glaciation de Riss.
On a retrouvé, en 2002, lors des travaux de la rue de la République, des briques d'argile crue ainsi qu'un four datant de 5000 av JC certifiant de l'installation de peuplades "avancées". D'autres traces consistent en des fonds de cabanes, de la peuplade des Véraziens datant d'environ 2500 av. JC.
L'urbanisation ordonnée (maisons le long des rues) date du 2ème âge du fer, Il s'agit du peuple des Elysices (certainement des Celtibères). Les Volques (tribu de la nation des Cimbres - même ethnie que les Gaulois) s'installent au milieu du 3ème siècle av JC depuis Toulouse jusqu'au Rhône. De Toulouse jusqu'au fleuve Hérault, ce sont les Tectosages ensuite les Arécomiques. A Béziers, ce sont plus précisement des Longostalètes (mention de ce peuple sur des monnaies de l'époque). Les Volques étaient certainement les "clients" des Arvennes."
En 600 av JC, création de l'oppidum d'Ensérune.
Le Caldéen Béross, qui vivait 350 ans av JC, nous raconte qu'Hercule passant dans la Gaule Celtique, eut des enfants de Galathée, fille d'un homme noble de la contrée, et que ces fils d'Hercule firent, par la suite, batir des villes auxquelles ils donnèrent leur noms.
Un Gué a existé jusqu'au XIIème siècle sous les murs de la ville; il est possible que le noyau primitif de Béziers se soit formé sur les bords de l'Orb, pour devenir, plus tard, sur la hauteur voisine, un Oppidum où les Gaulois se réfugiaient en temps de guerre. Au IVe siècle avant JC, Béziers devient une des principales villes des Volques Tectosages, mélanges de celtes, d'Ibères, de Ligures (venant de l'est du Rhone), des Phocéens et des Rhodéens qui avaient fondés des comptoirs et des colonies. Ils apportent sur nos côtes, la culture de la vigne, de l'olivier, ainsi que les germes de la civilisation.(Voir le plan)
En - 600 / -500, création par les Grecs de la première grande ville. Les fouilles archéologiques effectuées dans la rue de la République et la Madeleine montrent l'existance d'une ville Grecque de plus de 40 hectares, avec canalisations en plomb, réservoirs à grain (pithos) et superbes villas de plus de 150 m².
En - 121 / - 118, création de la Via Domitia (voie Domitienne, appelée par Aristote Via Herculanum ou voie Herculéenne avant son utilisation romaine) par le père de Néron, Cneius Domitius "Ahenobarbus" (qui signifie "à la barbe d'airain"), première voie romaine en Gaule.
Cité gauloise des Volces, Béziers, nommée alors Beteris, devient la colonie romaine de Julia Baetarrae en 36 av. JC. et intégrée à la province Narbonnaise.
Le forum s'étendait vraisemblablement devant l'actuel hotel de ville. Étape importante sur la voie Domitienne, la ville est un centre commercial actif. Le vin, d'abord importé de Campanie est ensuite exporté vers Rome au 1er siècle ap. JC, suite à l'introduction de cépages dans les plaines du Biterrois.
Mais en 77, suite à une crise viticole(déjà !), un décret (le décret 92) est prononcé afin de promouvoir l'arrachage de la vigne en Gaulle. Celui-ci sera abrogé en 280 par Protus qui rétablit la liberté de plantation. Au 3ème siècle, la ville est ceinte de remparts.
En 450, Béziers est conquise par les Wisigoths, qui la conservent jusqu'en 712-724 (voir carte de france à cette époque), date à laquelle elle est occupée par les Sarrasins. Ceux-ci détruisent massivement tous les vignobles.
En 736/737, la ville est finalement reprise, mais aussi ravagée par les Francs, menés par Charles Martel (fils bâtard de Pépin de Herstal et d'Aldaïde Pépin, et futur grand-père de Charlemagne, dont le surnom de Martel lui a été ajouté bien après sa mort pour le différencier des autres Charles de sa dynastie).
Le pouvoir y est partagé entre le vicomte, l'évêque et, à partir de 1131, le consulat, institution créée par une charte communale octroyée à la cité.
Le 15 octobre 1167 : Assassinat de Raimon Trencavel :
Au mois d'août précédent, le vicomte se porta au secours de son neveu, Bernard Aton, vicomte de Nîmes et d'Agde, qui était prisonnier du roi d'Aragon. Un soldat de Trencavel "emprunta" le cheval d'un noble afin de lui faire porter ses bagages.
Le noble réclamant justice, Trencavel fut forcé de sanctionner le soldat (la peine fut légère car ses troupes menaçaient de déserter...).
Le 15 octobre, suite à cet incident et alors que Trencavel était dans l'église de la Madeleine, il fut pris à parti par les bourgeois de Béziers et lynché jusqu'à la mort. L'évêque Bernard, qui tenta de s'interposer, eut la mâchoire fracassée.
Le pape, ayant appris cet horrible carnage, frappa d'excommunication la ville entière.
Assassinat de Trencavel dans l'église de la Madeleine
En 1185 est proclamé, en la cathédrale St Nazaire, un ensemble de décrets nommés "La charte libérale" :
- Désormais, le Vicomte ne peut créer d'impôts nouveaux sans le consentement de la population (cool non ?).
- L'Evèque et le Vicomte ne peuvent, l'un sans l'autre, exiger le serment des habitants.
- Le témoignage des bailes (procureurs) du Vicomte et de l'Evèque ne peuvent constater, seuls, l'adultère; ils doivent recueillir l'attestation des voisins et notables présents lors de la "capture" des fautifs.
- L'étranger qui promet par serment de s'établir à Béziers pendant un an est exonéré d'impôt.
- Les biens de ceux qui meurent sans testament ou héritier reconnu sont garantis pendant un an et un jour.Aprés quoi, ils sont dévolus au seigneur du bourg (Vicomte, Evèque ou Abbé).
- Les personnes appelées devant le juge ne sont plus tenues à verser de caution
Au début des années 1200, appuyé par le pape Innocent III, Simon de Montfort réunit une importante armée, lors de la croisade contre les Cathares :
La croisade s'avance en 3 énormes masses, convergeant vers Toulouse. Le lieu de rendez-vous se fait devant Béziers. La grande colonne du Nord, dirigée par Arnauld-Alméric, l'abbé de Citeaux, est composé des peuples et des princes d'outre-loire. On les désigne par le nom de Français (François).
La colonne de l'Ouest, moins nombreuse, est formée d'Aquitains, sous la conduite de l'archevêque de Bordeaux.
La troisième colonne, moins nombreuse, elle aussi, est dirigée par l'évêque du Puy-en-Velay et vient du Cantal. La croisade immense, tumultueuse, confuse, évaluée à quelques 300.000 combattants, arrive le 21 juillet 1209, la veille de la Sainte Madeleine devant les remparts de la ville. Elle a ramassé sur son chemin tous les vagabonds et hommes de proie de l'Europe ainsi que le roi des ribauds, à la tête de ses 15.000 truands déguenillés, formant une hideuse avant-garde.
Les croisés et la prise de Béziers, par Paul Lehugeur, XIXème s.
Elle enveloppe la ville comme une nuée et campe autour des murailles. Des centaines de tentes sont installées tout autour de la ville, certaines agrémentées de riches pavillons. Renaud de Montpeyroux, l'évêque de la cité, sort pour tenter de négocier avant les agresseurs. Mais Amaury lui donne comme ultimatum de livrer les 222 hérétiques cathares ou vaudois inscrits sur une liste (écrite par l'évêque lui-même) ou bien de quitter la ville en y abandonnant les hérétiques.
L'évêque et quelques catholiques sortent, mais beaucoup de prêtres préférèrent rester avec leur paroissiens.
Une partie des Biterrois délibèrent pendant la nuit et décident d'attaquer les premiers, au petit jour. Dès que les premières clartés apparaissent, ils sortent par la porte orientale, agitant dans l'air leur pénoncels (bannières) blancs et criant comme pour épouvanter des oiseaux. Ils commencent alors à décocher quelques flêches. Un croisé qui s'était aventuré sur le pont (porte des Carmes/St Guilhem ?) s'écroule percé de flêches. Un truand est pris, lancé du haut du pont et mis en lambeaux.
|
|
A cette attaque inattendue et à la vue de cette victime, le roi des ribauds sonne de son cor : tous le camps déguenillé s'éveille à ce son, comme un guépier effarouché. Les maraudeurs se lèvent, frémissant de rage, nu-pieds, en chemise, en haillons, armés d'un pic ou d'un levier, d'une massue, ... Le cri "aux armes !" retentit dans le camp des princes; les chevaliers accourent à la rescousse des bohèmes. La horde hideuse refoule la milice vers les murs et pêle-mêle s'engouffre sous l'arche profonde de la porte orientale puis, finalement, prend pied dans la ville. Pendant deux heures des combats se déroulent près de la porte et dans les quartiers nord. Mais la marée humaine des ribauds, suivie de l'armée des croisés, envahit les murailles et peu à peu tous les quartiers de Béziers.
Les citoyens reculent; le combat se change en déroute et la déroute en massacre. Les 15.000 truands composant l'armée des ribauds s'élancent au travers de la ville à l'insu des chefs militaires croisés. Le meurtre erre de maison en maison, de rue en rue, de quartier en quartier. Les bohèmes égorgent tout, femmes, enfants, vieillards et même les clercs. Environ sept mille habitants, qui s'étaient réfugiés dans la basilique de la Madeleine, sont égorgés. D'autres, dans la cathédrale Saint Nazaire, subissent le même sort. Les prêtres voulant célébrer l'office des morts sont tués sur l'autel. Le feu est mis aux deux églises pour achever les derniers survivants. Puis le meurtre fait place au pillage et le pillage engendre un nouveau combat entre les vainqueurs.
Les barons essaient d'arracher la ville à la rapacité des truands. Ils leur font lâcher prise à coup d'épée, à coup de baton, comme à des chiens. Mais le roi des gitans ne veut pas céder son butin à l'abbé de Citeaux : c'était le prix du massacre. Il fait mettre le feu à la ville, pleine de richesses, pleine de cadavres. L'incendie refoule les vainqueurs, dévore leur proie et leur espérance, et Béziers périt tout entier. Le nombre des morts : l'abbé de Citeaux en avoue 15.000 au pape Innocent III : 7000 à la Madeleine et 8000 à Saint Nazaire. Nangis en ajoute 2000 de plus et Guillaume le Breton porte ce chiffre à 60.000. D'autres auteurs feront monter le chiffre à 100.000; cependant, un chiffre de 50 à 60.000 semble être le plus proche de la réalité.
La cathédrale Saint-Nazaire, construite à la fin du XIIème sièce, par un certain Maître Gervais, est incendiée elle aussi et s'écroule sur les gens qui s'y étaient réfugiés. [de l'édifice subsiste, de nos jours, les deux travées droites du chœur, la base du clocher et les parties inférieures du transept. Après cette destruction, la cathédrale sera progressivement rebâtie : à la réparation de la nef (fin XIIIème siècle), succèdera la construction du chœur, les chapelles latérales, la facade occidentale et le cloître (XIVème siècle). Puis, en 1444, l'évêque Guillaume de Montjoie fera édifier la chapelle dédiée aux saints Nazaire et Celse (l'actuelle sacristie) ainsi que celle située au-dessus de la salle capitulaire. Entre 1623 et 1632, une tribune et un orgue seront édifiés au fond de la nef. Au XVIIIème siècle, le chœur est rénové et le jubé, qui le fermait au niveau du transept, démoli. La cathédrale sera restaurée au XIXe siècle, puis en 1932.
Ce massacre (le "gran mazel" en occitan - la grande boucherie) restera gravé dans les mémoires. Les croisés verront Béziers brûler pendant 3 jours. Une grande partie des ruines restera près d'un siècle sur les cimes, un noir amas de décombres et d'ossements. Les troubadours en feront l'écho, tel le célèbre toulousain Guilhem Figueira qui écrivit une diatribe virulente contre l'Église romaine.
En 1229, Béziers est rattachée à la couronne de France.
En 1562, les réformés s'emparent de la cité et saccagent ses édifices religieux. Une fois l'ordre rétabli, la ville devient l'une des résidences des ducs de Montmorency, gouverneurs du Languedoc.
En 1632, après l'échec de la révolte d'Henri II de Montmorency, c'est à Béziers que le roi, accompagné de la reine, de Richelieu, et de son conseil, promulgue l'édit qui annule les franchises du Languedoc.
Sous le règne de Louis XIV, la ville s'enrichit. La bourgeoisie locale vit du revenu de ses domaines où sont produits le blé, le vin et l'huile. Sur les bords du ruisseau de Bagnols, on trouve moulins, distilleries et tanneries. Le marché hebdomadaire, reconnu par décret royal en 1552, est un lieu d'échanges sur la route qui relie la vallée du Rhône et l'Espagne. Béziers est la patrie du marquis Paul de Riquet, constructeur du canal du midi. La construction durera de 1666 à 1680.
La cité traditionaliste et catholique, où prospère une bourgeoisie cultivée, est peu sensible aux idées révolutionnaires. Néanmoins, son évêché, fondé au IVe siècle, est supprimé en 1801.
La prospérité économique s'affirme au XIXe siècle: les exploitations agricoles sont agrandies et modernisées, et avec le développement des chemins de fer (ligne Bordeaux-Sète, 1857), le Biterrois se lance dans la monoculture de la vigne. Peu touchée par le phylloxéra, qui l'atteint en 1878, Béziers est la ville la plus riche du Languedoc à la fin du XIXe siècle. Néanmoins, elle n'échappe pas à la crise viticole de mévente qui éclate en 1907.
L'essor de la viticulture induit le développement de nouvelles industries (tonnelleries, cuves en béton, engrais, matériel agricole), au détriment des activités traditionnelles (textile). Par ailleurs, la ville se dote d'établissements financiers, de sociétés de commerce et de transports mais aussi de magasins d'alimentation à succursales comme la Ruche du Midi ou les Docks méridionaux (42 magasins en 1911).
L'enrichissement de Béziers se traduit par l'accroissement considérable de la population : le nombre d'habitants quadruple quasiment entre 1821 et 1901.